Cet article est la retranscription de ma chronique sur le podcast Le Magicien. Aujourd’hui, je vais vous parler du fait de lier les cartes entre elles quand on fait une lecture. C’est une question importante, et on le prend en effet comme un problème ; seulement, ce qui est vrai, c’est que lier les cartes entre elles est vraiment le petit plus qui fait la différence entre un tirage qui ne parle pas et un tirage qui nous emporte, qui nous chamboule, et qui peut nous changer la vie.
C’est vraiment important de bien lier les cartes, parce que sans cela c’est vraiment difficile de se projeter dans le tirage et d’obtenir une vraie compréhension de la situation. Donc aujourd’hui, je voudrais prendre un petit moment pour définir de quoi on parle, comprendre pourquoi on considère ça comme un problème difficile, démontrer que comme beaucoup de choses en tarot, quand on prend ça de façon plus ludique et plus terre-à-terre, ça devient tout de suite facile, et vous donner quelques exemples. En gros, mon but, c’est qu’à la fin de cet épisode, vous n’ayez plus de gros point d’interrogation au-dessus de la tête quand on vous montre des bouquins avec des combinaisons de cartes que vous ne comprenez pas et que vous vous demandez comment appliquer. Alors détendez-vous, et profitez de l’épisode !
Alors quand on parle de liens entre les cartes, ça paraît très abstrait. On connaît la signification de la carte 1, on connaît la signification de la carte 2, donc comment on est censé inventer une autre interprétation qui ferait le lien entre les deux ? Vous voyez que se poser la question en ces termes-là, ça ne rend pas les choses claires du tout. Je pense vraiment qu’en général, quand on bloque en tarot, c’est qu’on se pose la question en termes compliqués au lieu d’y aller avec bon sens. Je crois que ça vient du fait qu’on a encore un peu l’habitude de voir le tarot comme quelque chose de très mystique, de très initiatique dans le sens où il faudrait être initié pour le comprendre, et que donc les gens normaux doivent avoir du mal, de très plein de sagesse alors on a intérêt à se montrer à la hauteur, soit en disant soi-même des choses pleines de sagesse quand on lit son tirage, soit en allant vraiment chercher très très loin. Moi, je ne pense pas que cette vision soit juste, déjà, et je ne pense pas qu’elle soit utile. Je pense qu’on s’en sort beaucoup mieux sans. Donc on peut me reprocher tant qu’on veut d’être iconoclaste, de ne pas respecter le sanctuaire machin, mais moi, je suis très clairement de l’opinion que si tu mets un outil de connaissance de soi dans un sanctuaire, et que tu interdis aux gens « normaux » d’y accéder, c’est que tu veux le réserver à une élite, donc que tu ne veux pas que la populace accède à la connaissance de soi, et politiquement pour moi c’est problématique. Voilà.
Pour moi, les problématiques de montée de l’extrême-droite et compagnie, c’est un problème dû au fait que l’être humain a cette tendance à se comporter et à penser en meute. De mon point de vue à moi, c’est important de rendre hyper accessible un outil comme le tarot, parce que t’approprier les cartes, c’est comprendre ce qu’elles veulent dire pour toi, parce que lire ton tirage, c’est trouver l’interprétation qui te parle à toi de ta vie dans ta situation, pas répéter ce que tu auras lu dans un livre, seulement t’en inspirer ; c’est apprendre à penser par soi-même. C’est vraiment important de penser par soi-même dans une époque où tout essaie de nous influencer pour modifier nos comportements à notre insu, notamment en nous balançant des images émotionnelles pour tuer notre esprit critique, nous amener à voter par ci par là, etc. Moi, j’aime le tarot parce que c’est un moment de recul qui nous reconnecte à nous-même, qui affine notre esprit critique si on a compris qu’on n’était pas là pour voir uniquement ce qu’on a envie de voir dans les cartes, et qui nous habitue à penser par nous-mêmes sans se sentir effrayé ou coupable.
Donc, les liens entre les cartes. Je vais vous donner un exemple, et vous allez voir que quand on prend ça de façon détendue, ça devient tout de suite intuitif.
Je tire deux cartes au hasard, le Mat et la Papesse. Le Mat se lance, la Papesse connaît les mystères. On va essayer de faire un lien entre ces deux cartes, parce que si je dis juste « je me lance » et « je sais » c’est difficile à comprendre. Mais vous voyez, déjà commencer à le dire comme ça, ça peut commencer à mettre la puce à l’oreille. Je me lance, puis je sais. Donc, avant de me lancer, je ne savais pas, et après m’être lancé, j’ai appris. Le fait de me lancer, d’y aller, c’est ça qui me fait comprendre le mystère, c’est ça qui me fait apprendre ce qui était caché, c’est pour ça qu’à la fin je connais le mystère, alors qu’avant je ne le connaissais pas. Une façon amusante de résumer tout ça, ce serait « j’ai été voir ». Je ne savais pas, je me suis lancé, maintenant je sais. On pourrait dire aussi : « Il a posé la question ». Là, moi j’imagine une famille dans laquelle il y a un secret, personne n’en parle jamais, dans cette famille il y a quelqu’un qui sent bien qu’il y a quelque chose à savoir, mais jusqu’ici personne n’a osé en parler, eh bien lui il se lance, il pose la question, il verra bien, ça se trouve ça va tout changer, et il ne sait pas comment on va réagir, donc c’est bien un saut vers l’inconnu. Eh bien on lui répond, et maintenant il sait. Et aussi, il sait pourquoi on n’en parlait pas, donc maintenant, à son tour, il se tait. « Dis, papa, pourquoi blablabla ? … Ah. Ok. ». Ce doit être un secret bien tordu… J’imagine un scénario comme ça, mais vous pouvez imaginer celui que vous voulez, pour aller avec l’idée de se lancer pour acquérir le savoir qu’on n’avait pas. C’est ça, le lien entre les deux cartes. On pose leur signification, donc ici 1/ je me lance et 2/ j’ai le savoir ; on essaie de raconter ça dans une histoire logique, 1/ je me lance à poser la question et 2/ j’ai le savoir parce qu’on m’a répondu. Enfin, si vraiment on veut mais ce n’est pas obligé, on peut faire la petite fioriture paquet cadeau, et résumer les deux idées en une seule, en disant, par exemple : « il a eu sa réponse ». Mais ça, ce n’est pas obligé, parce que rien qu’en racontant l’histoire où quelqu’un se lance à poser une question et qu’ensuite il a sa réponse qu’il garde, on a compris.
Le problème qui nous bloque quand on est débutant, à mon avis, c’est qu’on considère tout ça sous un angle très abstrait. Je vois les deux cartes, et je me dis : comment je fais le lien, comment je fais la combinaison, que sais-je. Donc, je me pose la question en termes abstraits, parce que je n’ai même pas regardé les deux cartes, je n’ai pas encore posé la signification des deux cartes que je suis déjà en train de flipper à ne pas voir leur « lien » qui serait une mystérieuse troisième carte qui n’est pas posée sur la table, donc que je ne peux pas voir de toute façon. Je propose de ne pas s’y prendre comme ça, parce que ça fait peur pour rien, et que ça n’apporte rien. En fait, je propose de ne pas se poser la question du tout. Ne cherchez pas explicitement à toute force à sortir le fameux lien. On s’en fout de cocher des cases comme ça. Regardez juste vos deux cartes, dites-vous les significations de chacune, et laissez-vous aller, si vous voulez, à rêvasser l’histoire qu’elles racontent. Dites-vous que ce sont deux cases d’une BD, et que vous avez juste à raconter ce que fait votre personnage. Au début, vous ne verrez pas, et si vous vous laissez prendre au jeu, vous trouverez forcément une histoire. Forcément. Et là, avant que vous ne commenciez à avoir peur et vous dire que ce sera difficile de trouver une histoire, prenez un enfant de quatre ans, n’importe lequel, mettez-le devant vos cartes, et demandez-lui qu’est-ce qu’il fait le bonhomme. L’enfant va vous répondre avec une histoire. Il ne va pas passer trente ans à se casser la tête avec la symbologie et la numérologie initiatique. Il va vous dire : ah ben le bonhomme, il est avec son chien là, il va vendre son chien à la dame avec sa couronne. OK ! Moi ça m’inspire quand un enfant dit ça, parce que si j’amène mon chien, mon chien ça peut être mes tendances spontanées, ce qu’on m’a appris, et je vais le vendre à la papesse, c’est-à-dire je vais le lui montrer pour qu’elle me dise ce qu’il vaut, mon chien. C’est ce que je fais chez le psy quand je lui raconte mes tendances un peu automatiques, quand j’ai des comportements qui ne sont pas réfléchis, un peu comme si je répétais des choses inconsciemment, et qu’il m’amène à comprendre la raison cachée derrière. Donc je me lance, je parle à mon psy de ces questions, et après, j’ai compris, je connais le mystère. Vous voyez, c’est une autre histoire possible, une autre interprétation, mais il n’y a pas « la » bonne interprétation en tarot, ça n’existe pas. Pour penser par soi-même, il faut bien comprendre qu’il n’y a pas une correction qui serait vraie et tout le reste qui serait faux. Moi je vous raconte des histoires comme celles-là parce que ça me parle, vous votre histoire elle sera sans doute très différente, mais elle sera logique, elle vous parlera.
Donc, il suffit de regarder ses cartes ; vous savez qu’elles veulent dire ceci et cela ; pour trouver le lien entre elles, vous devenez un enfant de quatre ans, sérieusement, parce que plus vous aurez l’impression que c’est une opération occulte et inaccessible moins vous y arriverez, donc vous devenez un enfant de quatre ans, vous racontez l’histoire du bonhomme. Cette histoire vous permet de comprendre en quoi c’est logique que la seconde carte suit la première. Évidemment qu’il a fallu que je pose ma question pour avoir ma réponse. Maintenant que je me suis fait mon histoire, ça me paraît évident.
Je pense vraiment que la difficulté de l’idée de trouver le lien entre les cartes vient du fait qu’on prend la question à l’envers. On ne peut pas comprendre le lien entre les cartes si on n’a pas déjà posé les significations des deux cartes, et qu’on les a imaginées comme une histoire. Le lien, c’est ce qui rend leur articulation logique, mais vous ne pouvez pas la trouver si vous n’avez pas créé l’histoire. Je crois que c’est pour ça que ça paraît si abstrait aux débutants, parce qu’on ne vous dit jamais, en fait, que bien lire un tirage c’est une question de storytelling, c’est juste raconter l’histoire de ce qu’on voit dans les cartes. Je pense que si on ne vous le dit pas, c’est parce que ça paraît tout bête, trop simple, et qu’on a envie de défendre un peu son pré carré, qu’on a envie de montrer qu’on est vraiment cool parce qu’on maîtrise un outil vraiment très compliqué et très occulte qui est le tarot. Moi, je pense que tout devient vraiment plus simple quand on a compris qu’on pose des images sur la table, et que plusieurs images mises ensemble racontent une histoire, c’est le principe de la BD. C’est peut-être irrévérencieux, mais si j’ai compris une chose, c’est qu’y aller avec révérence, ça interdit de penser. Si tu vas voir quelqu’un et que tu le traites avec révérence, ça veut dire que tu le considères comme un roi, que tu ne vas montrer aucun esprit critique et que tu vas te plier à tout ce qu’il va dire. Pour moi ce n’est pas ça, le tarot. Si tu te plies à tout ce que te disent tes cartes, déjà, tu cours le risque de la dépendance, tu risques de tirer les cartes pour un oui et pour un non, pour qu’elles décident à ta place et surtout ne pas penser par toi-même. Cela, c’est le piège de la dépendance, et ça existe, une telle dépendance aux cartes. C’est un danger notamment pour ceux qui pratiquent le tarot divinatoire, parce que même un très bon praticien risque de se retrouver face à des clients qui essaieront de le mettre en position de « sachant », qui lui demanderont de décider pour eux. Moi, je pense que la bonne utilisation du tarot, c’est de se servir des cartes pour nous montrer notre situation par un autre angle, pour remettre en question les croyances dont on ne se rendait pas compte, et pouvoir prendre nos propres décisions en connaissance de cause. Donc comme il s’agit de se libérer de croyances qui pensent à notre place, pour penser par nous-mêmes, c’est important d’être irrévérencieux, justement. Donc voilà, si vous voulez savoir lier les cartes entre elles, considérez que c’est une BD et racontez l’histoire.
Pourquoi est-ce que ça marche, et surtout, pourquoi est-ce que c’est vraiment très important, d’avoir un tirage sous forme d’histoire, de narration ? Parce que pour que votre tirage parle, il faut qu’on puisse se projeter dedans. Or, on ne peut se projeter que comme dans une histoire. C’est pour ça qu’on consomme autant de fiction, d’ailleurs, que ce soit des films, des séries, des romans, des BDs. C’est pour ça qu’on nous dit que pour commencer une introduction de livre ou de conférence, c’est bien de commencer par un exemple personnel ou par une histoire qui est arrivée à quelqu’un, parce qu’on se projette directement, et que ça accroche l’attention. Pourquoi les histoires nous parlent ? Parce que nous, en tant qu’être humain, on fonctionne par histoire. On fait sens de notre vie en nous la racontant sous forme d’histoire. L’histoire qu’on se raconte de notre vie, parfois elle est forte et autonomisante, parfois non, il se peut qu’elle soit plus compliquée, parce qu’on a reçu un trauma ou une éducation telle qu’on a intégré le fait de ne pas avoir confiance en nous, par exemple. L’intérêt d’un tirage de tarot, c’est qu’il va nous raconter une autre histoire de notre vie, une histoire où on va tourner les choses autrement, par exemple pour montrer que c’est OK d’être représenté par des cartes brillantes comme le Soleil ou le Monde, même si on a l’habitude de ne pas avoir confiance en toi. Toi tu n’as pas confiance en toi parce que tu as l’habitude de te raconter une histoire où quoi qu’il se passe tu es insuffisante ; le tarot, lui, il te raconte une autre histoire, où il te montre qu’à chaque fois, par tes efforts, tu as apporté beaucoup autour de toi sans t’en rendre compte.
Donc, si vous voulez qu’un tirage parle, il doit raconter une histoire. Ne vous embêtez donc pas à vous demander les liens entre les cartes de façon abstraite. Chaque fois que vous interprétez une carte, demandez-vous en quoi il est logique qu’elle soit tombée, par rapport à la précédente. Si vous vous demandez à chaque fois en quoi ça fait sens par rapport à ce que vous venez de dire, les liens se feront tout seuls, et l’histoire logique se construira toute seule. Ne pensez pas à faire des liens, c’est abstrait, ça va vous bloquer, expliquez juste en quoi votre tirage est logique. Ça, ça fera ressortir tous les liens naturellement, sans que vous ayez besoin de vous torturer, parce que c’est plus facile de raconter quelque chose de logique, que de raconter des éléments qui n’ont pas de sens les uns par rapport aux autres. Je vais vous donner un petit exemple, encore une fois avec des cartes tirées au hasard. Les cartes sont aléatoires, donc de base, elles n’ont pas de rapport entre elles, soyons clairs. C’est au fur et à mesure qu’on les interprète, qu’on les examine les unes après les autres, qu’on se met à voir la logique du tirage. On ne peut absolument pas voir la logique du tirage avant d’avoir interprété les cartes, que ce soit bien clair.
Donc, imaginons que je fasse le tirage suivant. On va faire un début de croix celtique, histoire d’avoir de quoi poser un peu un personnage, et voir si l’histoire fait sens. La croix celtique est un tirage très intéressant, j’en ai parlé plus en détail dans un autre épisode de ce podcast. La lire, c’est raconter l’histoire d’un personnage. Si c’est votre consultant, ce sera son histoire ; si on la fait dans le vide, sans consultant, ça devient un générateur de personnage, comme je vous le montre dans ma formation sur l’écriture de fiction par le tarot, que vous retrouverez sur mon site. Si vous faites du jeu de rôle, ça va vous intéresser.
Premier emplacement : la personne en général. Cinq d’épées ; dans le système Rider-Waite, ce sont les conflits, les disputes, la critique. Si cela représente la personne en général, on peut dire que la personne a tendance à monter au conflit, à se montrer critique, peut-être que sa communication est un peu agressive, qu’elle a tendance à toujours pointer ce qui ne va pas. Pour l’instant, je n’ai pas de lien à faire, puisque je n’ai encore qu’une carte.
Deuxième emplacement : son problème. Son problème, c’est le 2 d’épées. C’est une carte qui montre une personne aux yeux bandés, les bras croisés sur sa poitrine en position défensive, comme si elle ne pouvait pas faire un choix, qu’elle ne pouvait que refuser, que se fermer. Son problème, c’est qu’il bloque, qu’il refuse tout au lieu d’accepter. Cela me paraît logique, parce que si la personne a tendance à tout critiquer, c’est qu’elle est plutôt dans le refus que dans l’acceptation. C’est cela mon lien entre les deux cartes, c’est un lien de cause à effet qui me paraît très évident maintenant que j’ai décrit le 2 d’épées à la lueur de ce que j’avais dit sur le 5. Donc, j’ai une personne à la communication en général négative, et son problème, c’est qu’elle est dans le refus. C’est une personne qui essaie de se protéger. C’est ça la cohérence de mon histoire. Et devant ce genre d’histoire, on se représente bien les personnes qui sont toujours négatives, qui disent toujours non, qui pointent toujours la faille quoi qu’on leur apporte. Vous en connaissez forcément. La personne qui dit que ça ne va pas, et vous comme vous êtes gentil vous voulez l’aider à résoudre son problème, donc vous lui dites : oui, mais tu pourrais faire ceci cela, et elle vous répond toujours : non, ce n’est pas possible parce que telle ou telle raison. Et vous pouvez jouer au ping-pong comme ça avec elle pendant un moment, elle va toujours réussir à vous expliquer en quoi ce n’est pas possible de résoudre son problème. Donc soit vous jetez l’éponge et vous partez frustré, soit vous comprenez qu’elle ne vous demandait pas de l’aider à résoudre son problème, en fait. Quand une personne est très bloquante, très négative, comme ça, ce n’est pas du tout qu’elle se fait un malin plaisir à vous mettre en défaut, c’est plutôt qu’elle a vraiment très peur de ce qui pourrait changer et qu’elle essaie de se protéger. Cela, c’est ce qu’on constate quand on observe un peu les gens, donc c’est ce qu’on peut reconnaître dans nos deux cartes. La personne est négative, c’est normal, parce que son problème, c’est qu’elle essaie de se protéger.
Donc, ces deux cartes prises au hasard semblent comme par hasard parfaitement bien se compléter. Cet effet-là, c’est ce qu’on obtient quand le lien est bien fait. On trouve une histoire qui va vraiment bien avec les deux cartes, l’histoire est logique, donc a posteriori, on se dit que la carte ne pouvait pas mieux tomber. C’est vraiment un effet hyper intéressant, et hyper puissant, dans le tarot.
On continue avec une troisième carte : d’où il vient, c’est-à-dire qu’est-ce qu’il y a eu dans son passé. Oui, parce que si aujourd’hui il a cette attitude tellement défensive que ça l’amène à casser les pieds de tout le monde constamment, il faut bien qu’il y ait une raison ! D’où il vient, la Maison-Dieu. Il n’a pas de chance ce personnage. La Maison-Dieu, c’est l’écroulement, c’est quand ton monde s’écroule parce que tout à coup, tu te rends compte que ce n’était pas comme tu pensais, c’est très angoissant. Alors, en quoi il y a un rapport avec le fait que notre personnage aujourd’hui essaie de se défendre, jusqu’à tout refuser et être hyper négatif tout le temps ? C’est logique, parce que quand on a subi un trauma comme celui de la Maison-Dieu, on peut très bien ne plus oser bouger du tout ! On avait construit quelque chose, mais tout s’est écroulé, parce que ce n’était pas comme on pensait. Il y a de quoi ne plus vouloir rien construire de nouveau, de peur que ça ne recommence ! On commence à imaginer notre personnage. Peut-être qu’il a divorcé, son mariage s’est écroulé sans qu’il comprenne, son partenaire est parti en claquant la porte, tout ça. Depuis, il est célibataire, il déteste ça, mais dès qu’on lui présente quelqu’un de nouveau, il ne voit que ce qu’il ne va pas. La personne est trop petite, trop grande, pas assez riche donc ça va être un boulet, trop riche donc ça va être un coincé, bla bla bla, ça ne va jamais. Et pourquoi ça ne va jamais, parce qu’il a trop peur de s’attacher à nouveau, et de voir la relation s’écrouler comme ça a été le cas dans le passé. Il refuse la possibilité de s’ouvrir à une nouvelle relation, parce qu’il reste bloqué sur son passé.
C’est logique ! C’est logique que notre personnage soit négatif, parce qu’il se protège, parce que son monde s’est écroulé une fois déjà et qu’il ne veut pas que ça recommence. Lier les cartes, c’est raconter l’histoire, et là on a une histoire cohérente, d’un personnage pour lequel on commence à avoir un peu de peine d’ailleurs. On continue : où il va. Où il va, c’est le futur en général. Il va vers… l’Empereur. D’habitude, l’Empereur, c’est bien, parce que c’est la solidité, la stabilité. Mais là dans mon histoire, ça ne ferait pas vraiment sens. Tu refuses tout parce que tu n’as pas surmonté ton trauma, donc ça te rend solide ? Je ne comprends pas cette phrase. Donc ce n’est pas la bonne interprétation. Dans ce contexte, j’ai plutôt envie de voir l’Empereur dans son côté rigide. C’est moi qui donne les règles. C’est comme ça et pas autrement. Si tu ne te conformes pas à mes règles très rigides, tu dégages. J’imagine notre personnage en train de faire une liste de qualités pour le prochain partenaire qu’il voudrait rencontrer, mais la liste est tellement précise, tellement longue, tellement rigide, que ça va être difficile de nouer une relation saine. J’ai l’impression que notre personnage a répondu à son trauma d’abord par l’évitement, en devenant négatif sur tout, ensuite par la rigidité, en essayant de tout contrôler pour que ça ne pète pas de nouveau comme par le passé. Cela, bien sûr, ce n’est pas un avenir gravé dans le marbre ; notre personnage, il y va si il veut, il réalise cette carte si il veut, et si ça ne lui plaît pas, il pourra faire autrement. Une carte d’avenir comme ça, c’est pour nous faire voir ce vers quoi on est en train de se diriger aujourd’hui ; si ça ne nous plaît pas, on est toujours libre de redresser le cap. Un tirage comme cela, ça peut être très utile, parce que ça te met devant les yeux ce qu’il risque de t’arriver si tu continues à te braquer au lieu de traiter ton trauma comme tu en as le droit, de t’en guérir comme tu le mérites au lieu d’essayer de le faire payer aux autres. Vous voyez que ce type de tirage peut donner des messages frappants. Là mon personnage n’a pas eu de chance entre guillemets, parce qu’il a tiré toutes ces cartes dures en début de tirage, mais avec d’autres cartes ce serait la même chose. Au fur et à mesure que l’on examine les cartes, on se demande comment la nouvelle fait sens par rapport à la précédente. Pourquoi c’est logique, en fait. Quand on se demande pourquoi c’est logique, on finit par trouver une explication. C’est comme cela qu’on lie les cartes : en les reliant dans une histoire cohérente, parce qu’il n’y a qu’une histoire cohérente qui puisse nous parler, ou parler à votre consultant. Si ça vous paraît difficile quand vous m’écoutez le faire, c’est peut-être parce que vous êtes en train de vous dire que vous n’auriez pas trouvé exactement tout ça tout seul. Évidemment que vous n’auriez pas trouvé la même histoire, puisque vous n’êtes pas moi. Évidemment que ça aurait été une autre histoire. Les tirages qui vous parlent ne sont pas les tirages qui parlent à quelqu’un d’autre. Donc rassurez-vous. Le but n’est pas de trouver « la » histoire correcte, c’est de raconter une histoire, tout simplement. Rappelez-vous de l’enfant de quatre ans qui ne se met pas tous ces bâtons dans les roues avant de sortir son truc. Le tarot, c’est plus facile quand on s’autorise à être davantage en roue libre, tant qu’on reste fidèle aux cartes qui sont sorties.
Donc sortez de votre mental, oubliez cette histoire de liens, dites-vous juste que vous racontez une histoire, et demandez-vous en quoi elle est logique. C’est cela qui fera des tirage parlants, parce que plus votre histoire est logique, plus elle est forte, et plus on se projette dedans. N’hésitez pas à vous entraîner avec un tirage de jeu de rôle comme je viens de faire, avec un personnage fictif, ça marche vraiment bien. Amusez-vous bien avec vos histoires, et au plaisir de vous retrouver pour d’autres lectures !
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