On tire les cartes au hasard, pour obtenir un message, un conseil, ou la réponse à la question qu’on se pose. Le sceptique est alors en droit de se dire : mais si j’avais tiré une autre carte, la réponse aurait été différente ! Quelle valeur lui donner si elle ne dépend que du hasard ? On y verra plus clair en comprenant bien de quel ordre est la vérité que nous cherchons dans les tirages de tarot.
Il ne faut jamais oublier que le tarot ne donne pas de vérités objectives (c’est-à-dire : indépendantes de nous qui tirons). C’est un outil qui parle de la vérité subjective, c’est-à-dire, de ce qui est vrai pour nous, à propos de nous. Inutile donc de « tester » les cartes « scientifiquement » : à cela elles échoueront toujours lamentablement ! La méthode scientifique exige qu’une expérience soit reproductible, et si vous faites deux fois le même tirage aléatoire pour la même question, vous obtiendrez des cartes différentes. (Les deux lectures auront quand même tendance à se recouper ; mais c’est parce que le point commun entre les deux interprétations, c’est vous, qui leur amenez la coloration de ce qui vous parle, à vous, subjectivement. Cela ne change pas le fait que les cartes tombées soient objectivement différentes).
Encore heureux, d’ailleurs, que le tarot ne nous donne pas de vérités objectives ! Si c’était le cas, il ne nous resterait plus qu’à nous soumettre à ce que disent les cartes, puisque ce seraient « elles » qui auraient « raison » et pas nous ! Quand on considère le Tarot comme un outil de libération personnelle, cette soumission n’est pas acceptable.
Mais alors, quel intérêt ? Comme on ne choisit pas les cartes que l’on tire, on s’ouvre la possibilité de lire autre chose que ce que l’on pense déjà, donc d’être surpris. J’ai tiré une carte bien embêtante pour représenter un domaine dans lequel je ne voyais pas de problème ? De cette surprise, je tire le prétexte de réfléchir à nouveau à ce qui m’avait échappé, et de penser autrement – peut-être avais-je le réflexe de prétendre qu’il n’y avait pas de problème, peut-être cela dit-il quelque chose d’important à mon sujet, peut-être ai-je tendance à faire des concessions plutôt que d’exprimer mes besoins, peut-être n’est-ce pas aussi « sympa » que ce que je me racontais.
En saisissant le prétexte de réfléchir à ce à quoi nous n’avions pas pensé, nous maximisons nos chances de nous débarrasser de croyances restées jusque-là cachées ! En réalité, l’intérêt du tarot n’est pas dans ce qu’il nous dit, mais bien dans le décalage entre ce que nous pensons et ce que les cartes racontent.
On comprend donc que ce n’est pas pas le tarot qui nous dit la vérité sur nous. C’est nous qui déduisons cette vérité grâce au moyen des cartes, qui ne peuvent que remettre en question nos préjugés et nos justifications, parce que le hasard ne peut pas respecter l’histoire qu’on se raconte. C’est pourquoi l’interprétation est un travail, et que ce travail n’est jamais évident !
En plus, les significations des cartes peuvent se décliner en de nombreuses facettes. La fécondité de l’Impératrice peut être entendue comme une créativité artistique, comme une fertilité intellectuelle, comme une maternité épanouissante, et encore d’autres. Chaque lecteur va retenir de ces facettes celle qui lui parle le plus, à lui, à ce moment, c’est-à-dire ce qui résonne en lui, ce dont il a besoin, donc ce qui est l’indice de la vérité qui est cachée en lui. C’est cela qui rend l’interprétation personnelle, qui fait que deux lecteurs ne tireront pas exactement la même conclusion de deux suites de cartes identiques – et qu’un même lecteur pourra trouver deux réponses similaires dans deux tirages différents. On travaille avec le tarot pour mieux se comprendre soi ; il est donc logique que les messages reçus ne valent que pour la personne en train de faire son travail.
Il n’est donc même pas nécessaire d’évoquer de notion spirituelle pour comprendre l’intérêt de ce jeu de cartes. Le tirage nous permet de nous approcher de notre vérité, c’est-à-dire de ce que nous sommes derrière nos croyances, nos préjugés et nos justifications, en les remettant sans cesse en question. Et pour toucher cette vérité du doigt, il suffit de « jouer le jeu » : on se met d’accord avec soi-même pour considérer que « les cartes qui sortent sont vraies » au moins le temps du tirage.
Le tarot est un jeu de cartes, et jouer, c’est aussi faire semblant. Si le jeu nous amène à comprendre quelque chose d’utile et d’éclairant sur nous-même, alors, c’est qu’il y a de la vérité ; il faut juste se rappeler que cette vérité n’est pas ailleurs qu’en nous.
¡Excelente artículo muchas gracias! Ojalá hagas una edición de tu Tarot Marsella-Waite en español.
Saludos desde México
Merci Oriana ! Ce serait avec plaisir, pour ça il vaut la peine d’envoyer un message en ce sens à l’éditeur, Trajectoire…