Sarvananda Bluestone étudie la lecture des signes à travers l’histoire. Il soulève la différence entre signes et superstition : celle-ci répète une information passée, qui a perdu son sens depuis longtemps, alors que le signe s’adresse au présent à celui qui le lit, et ne peut s’interpréter que par rapport à la situation où il se trouve à ce moment. Bluestone en déduit sept conseils et dix commandements pour l’apprenti devin.
Malgré la couverture la plus laide que j’aie jamais vue dans ma longue carrière, c’est un bon livre. Je trouve intéressant de partager ce passage ; c’est moi qui traduis.
How to read signs and omens in everyday life, Sarvananda Bluestone, Destiny books, 2002, p. 193
Pas de panique, il suffit d’être honnête : Sept conseils et Dix Commandements.
L’ingrédient le plus important de toute lecture, c’est peut-être la légèreté. Nous avons tendance à penser que plus quelque chose est sérieux, plus il y a de chances que cela s’approche de la vérité. Mais c’est oublier le fait que tout au long de l’histoire, ceux qui ont toujours été assimilés à la vérité sont les bouffons et les comiques. Plus une lecture est légère, plus elle sera facile à entendre, et plus il nous sera facile de parler de ce que nous voyons […].
L’Occident a développé de fausses croyances au sujet de la divination. A juste titre, les gens sont fascinés par les « pouvoirs magiques » de qui saurait des choses sur eux. Cependant, dans notre monde de show-business, la vraie magie n’est souvent plus qu’un tour de passe-passe. Par exemple, si un médium dit à quelqu’un que son plus jeune oncle a une verrue sur la joue gauche, c’est considéré comme ce qu’il y a de plus fort en termes de pouvoir psychique. Je ne sais pas comment ça se fait, mais ce genre d’information inutile est devenu une sorte de test ultime pour savoir si quelqu’un est un « vrai » médium.
Par contre, le lecteur qui dit à quelqu’un qu’il s’auto-sabote à force de douter, nous ne l’entendrons pas, comme celui qui dit à une personne qu’elle se trouve à un carrefour de sa vie, et qu’elle est pleinement capable de prendre les bonnes décisions. Voir la verrue sur la joue d’un oncle, c’est clinquant et tape-à-l’œil, mais c’est sans importance. Dire aux gens ce qu’il se passe dans leur vie à cet instant précis, ça a de l’importance. Comme tout autre groupe professionnel, les voyants professionnels aiment se différencier et se faire remarquer. Être voyant, n’est-ce pas un peu comme être neurochirurgien ou architecte, n’a-t-on pas besoin d’une formation et d’un don spécial ? Non, vous n’avez pas besoin d’une formation spéciale. Et tout le monde partage ce don.
Bien sûr, c’est intimidant de lire pour autrui. Nous n’avons jamais rien fait de tel, pour la plupart d’entre nous. Et si nous nous trompons ? Et si nous ne voyons rien ? Et si nous n’avons pas la capacité de faire une lecture ? Et si… Pas de panique. Il suffit d’être honnête. Il est tout simplement impossible d’échouer.
Sept conseils pour lire (pour) autrui
- Ne vous inquiétez pas. Soyez honnête. Vous avez fait ça toute votre vie. Tout petits déjà, nous recueillons de l’information des autres. Ce n’est pas quelque chose que nous devrions apprendre. C’est quelque chose que nous possédons. Une lecture, après tout, c’est simplement le fait de capter et d’avoir confiance en ce que nous voyons et ressentons.
- Ce n’est pas un examen. À l’école, nous apprenons toutes sortes de connaissances ; dans le domaine du psychique, nous découvrons ce que nous savons déjà. À l’école, nous apprenons qu’il y a des réponses justes et des réponses fausses ; le domaine du psychique est différent. Il nécessite d’ouvrir son cœur. Si nous essayons de faire de l’effet et de découvrir si l’oncle de quelqu’un a une verrue, nous pouvons faire des erreurs. Si nous essayons sincèrement de voir quelqu’un d’autre, nous ne pouvons vraiment pas nous tromper.
- Plus vous ferez d’effort, pire ce sera. Lire, c’est vraiment pour les paresseux. Dans le monde du travail, régi par le cerveau gauche, il faut faire beaucoup d’efforts pour réussir. Pour la lecture, qui appartient au monde du cerveau droit, c’est très différent. Ici, moins on en fait, mieux c’est. En réalité, il n’y a rien d’autre à faire que laisser les choses entrer. On laisse les choses se produire. Plus nous arrêtons de nous mettre des bâtons dans les roues, avec le dressage que nous avons reçu sur les façons de faire, et avec nos notions du bien et du mal, meilleure est la lecture. Et plus facile elle devient.
- Une lecture fonctionne dans les deux sens. C’est un processus qui implique deux personnes, pas seulement le lecteur. Celui qui lit et celui qui est lu (le praticien et le consultant) doivent tous les deux rester ouverts. Celui qui lit et celui qui est lu doivent prendre la responsabilité de ce qu’il se passe. Quand je donne une lecture, celui qui la reçoit est responsable du fait de la comprendre, et je le lui dis. Je veux pouvoir bavarder sans m’inquiéter de savoir si l’autre me suit. C’est pour cela qu’avant chaque lecture, je dis à la personne : « J’ai une seule règle : si je dis quoi que ce soit qui n’a pas de sens pour toi, ou qui te semble mal résonner, tu dois m’interrompre ».
- Plus on le fait, plus cela devient facile. C’est simplement une question de confiance en soi. Plus on dit ce qu’on voit, plus cela devient facile. Plus on dit ce qu’on voit et plus on en voit. C’est l’inverse d’un cycle vicieux. C’est un cycle bénéfique.
- Laissez l’avenir aux diseurs de bonne aventure. Les présages sont ancrés dans le présent. Ce sont des choses que nous voyons dans l’instant, et qui prennent sens pour nous à ce moment-là. La prédiction est une affaire très délicate qu’il vaut mieux laisser aux météorologues. Lorsque vous faites une lecture, vous voyez la personne au moment où vous faites la lecture. En réalité, le temps n’est pas linéaire. Si nous regardons attentivement l’instant présent, nous pouvons voir où les choses vont et d’où elles viennent. Mais c’est très différent de voir que quelqu’un va se cogner la tête à une porte trois ans, cinq mois, deux jours et six heures plus tard.
- Nous ne disons jamais rien que la personne ne sache déjà. C’est pourquoi une bonne lecture ne peut pas vraiment faire peur. La seule chose que nous faisons, c’est rappeler des choses que les gens savent déjà. Une lecture est au plus une forme d’affirmation.
Les Dix Commandements de la divination
Devins et voyants en tout genre ont depuis longtemps eu des codes moraux et éthiques à respecter. L’un des plus concis à avoir été édicté nous vient de la civilisation aztèque antique. Pour les Aztèques, un devin était quelqu’un qui « se souvenait ». Son rôle était de clarifier les choses. Un ancien texte aztèque est très clair à ce sujet : « Le bon devin est celui qui lit les signes du jour pour celui qui le lui demande ; c’est celui qui examine, celui qui se souvient… Il lit les signes du jour ; il les porte à notre attention. Le mauvais devin est un trompeur, un moqueur, un menteur, un hypocrite, un orateur diabolique et scandaleux. Il trouble, embrouille, dupe, et trompe les autres ». Pour suivre l’esprit des sages aztèques, je vous propose ces commandements :
- Aux gens quoi faire, tu ne diras pas. Tout d’abord, vous n’êtes pas leur mère. Deuxièmement, ce qu’il font ne vous regarde pas. Troisièmement, est-ce que vous voulez endosser la responsabilité de leurs décisions ? Nous avons déjà suffisamment de mal à endosser la responsabilité de nos propres choix, pour la plupart d’entre nous.
- « Tu devrais » ou « Tu ne devrais pas », de dire tu t’abstiendras. Un célèbre psychiatre américain a dit que nous avions tous tendance à nous « devoir » dessus. Il voulait dire la chose suivante : un « tu devrais » nous dit d’être ailleurs que là où nous sommes. Puisque nous ne pouvons être que là où nous sommes, un « tu devrais » nous demande l’impossible. Nous demander l’impossible, et le demander aux autres, c’est se sentir impuissants et/ou coupables. Qui a besoin de cela ?
- Tu ne jugeras point. Non mais sérieusement, qui vous a demandé de dire « ceci est bien » ou « cela est mal » ? Vous n’êtes ni Dieu ni la Cour suprême.
- De prédire, tu te retiendras, sauf si c’est avec un énorme grain de sel, et que vous le faites précéder d’un avertissement plein d’humour et de légèreté. On ne parle pas de la bonne aventure. On parle de ce qu’il se passe maintenant. Si ces diseurs de bonne aventure sont si forts, comment se fait-il qu’aucun ne soit devenu riche ?
- La mort jamais tu ne prédiras. Si vous vous prenez pour Dieu à ce point-là, allez vous faire examiner.
- Un terroriste psychique tu ne seras pas. Si tant de gens éprouvent une forte hostilité à l’égard des voyants, c’est parce qu’ils ont été témoins de terrorisme psychique. Les terroristes psychiques sont ceux qui aiment faire peur aux gens avec des prédictions noires. C’est un power-trip comme celui que je pouvais imposer à mon petit frère. Laissons les histoires d’horreur à Stephen King.
- Avec ouverture, compassion et amour, tu liras. Il n’y a pas d’autre moyen. On ne parle pas d’autre chose.
- Dans tes lectures, humble tu te montreras. Les meilleures lectures que j’ai jamais faites n’avaient que très peu à voir avec moi. Les pires étaient celles où je me croyais génial.
- Tes yeux et tes oreilles, tu utiliseras. Et le nez aussi. Parfois, nous sommes tellement fascinés par la magie que nous oublions ce qui est sous notre nez. Plus nous utilisons nos sens, plus nous ressentons.
- Avec sincérité et honnêteté, ce que tu vois tu diras. Pourquoi faire une lecture si ce n’est pas pour dire ce que l’on voit ?
How to read signs and omens in everyday life, Sarvananda Bluestone, Destiny books, 2002, p. 193
Images DreamStudio.
Voilà en effet quelqu’un qui est parfaitement en phase avec ce que tu enseignes. Je te suis depuis près de dix ans, et c’est vraiment l’aspect qui me convainc le plus dans ta pratique, avec, bien sûr, le « système » absolument génial que tu vois dans les majeures et mineures et expliques parfaitement dans tes livres. En dix ans, j’en ai croisé des tarologues auto-proclamés de 15 jours, qui lisent pour des gens fragiles et leur sortent des horreurs en toute impunité. C’est effrayant. Effrayant aussi, le nombre de personnes fragiles qui sont prêtes à s’en laisser conter, à entrer dans cette sorte de « servitude volontaire » qui les libère de tout effort personnel de compréhension …