Les cartes mineures sont toutes une combinaison de deux éléments : un chiffre de 1 à 10, et un élément parmi quatre. La symbolique des éléments a été expliquée ici : chacun représente une facette de notre expérience du monde. La progression des chiffres de 1 à 10 sert à représenter la façon dont l’élément en question grandit, se développe et s’accomplit au fur et à mesure de notre expérience.

Pour comprendre une carte particulière, il faut étudier la combinaison entre son élément et la signification symbolique du chiffre qu’elle porte ; cela nous permet à chaque fois de comprendre une leçon particulière sur l’élément. Voici la liste des significations des chiffres, leur influence (rapidement) sur la signification des mineures, et ce que l’on en retrouve dans les majeures – la cohérence du système du Tarot est un des aspects de sa richesse.

 

1 – Potentialité

Le 1 est comme une graine qui n’a pas encore germé, mais qui porte en elle tous les potentiels de la plante. C’est une capacité en puissance, un don qui est fait au consultant et qu’il lui appartient de travailler.

  • L’As de Bâtons présente “l’allumage” du désir : c’est l’apparition d’une intention, d’une motivation.
  • L’As de Coupes constate les capacités du plan émotionnel.
  • L’As d’Epées représente l’intelligence qui nous est donnée, et qu’il nous appartient d’aiguiser.
  • L’As de Deniers est l’opportunité que nous avons de nous développer sur le plan matériel.

Tout cela nous est donné, raison pour laquelle les quatre as du Rider-Waite sont représentés offerts par une main céleste, car nous ne pourrions pas les développer à partir de rien : construire notre motivation impliquerait que nous ayons déjà la motivation de le faire…

De même, le Bateleur (I) nous indique comment on fait pour agir, mais n’a encore rien créé ; la Justice (XI pour Waite) donne simplement l’idée de la responsabilité en laissant au Pendu le soin de l’appliquer ; le Monde (XXI) est une plénitude qui jouit d’elle-même.

 

2 – Rencontre

Lorsqu’1 et 1 se rencontrent, chacun découvre qu’il peut y avoir un autre point de vue que le sien, et se demande comment il peut apparaître aux yeux de l’autre ; c’est le début de la réflexivité. On apprend ; on ne réalise pas encore.

  • Le Deux de Bâtons est une rencontre entre le désir et ce qui est autre que lui, c’est-à-dire le monde. C’est donc le moment d’évaluer ce que nous pouvons faire dans le monde.
  • Le Deux de Coupes est une rencontre sur le plan affectif : découverte de l’amour, de la réciprocité, du respect d’autrui.
  • Le Deux d’Epées voit une perspective en rencontrer une autre ; comme on ne sait pas encore dépasser ce type de conflit, on détourne le regard pour se protéger.
  • Le Deux de Deniers est une rencontre entre deux choses matérielles : comme on ne peut pas se décider, on est obligé de jongler entre elles.

De même, la Papesse (II) est toute en réflexivité réceptive : elle étudie son monde intérieur, mais elle n’agit pas dessus ; le Pendu (XII) aux mains liées découvre littéralement un autre point de vue, avec sa tête à l’envers.

 

3 – Eclatement créatif

Le 3 suit la rencontre des 2 comme un couple crée un enfant. C’est donc un chiffre de créativité et de génération ; actif, il démarre le développement de l’élément sous forme d’éclatement.

  • Le Trois de Bâtons voit le désir passer en mode conquérant : c’est le lancement d’une entreprise.
  • Le Trois de Coupes représente l’éclatement de l’émotion : la joie, qui se nourrit d’elle-même dans la fête.
  • Le Trois d’Epées, après cette tentative avortée d’ignorer le problème, essaie de créer la synthèse ; mais cela ne donne qu’un point de vue supplémentaire, douloureusement impossible à réconcilier avec les deux autres.
  • Le Trois de Deniers parle de création matérielle : un travail d’équipe, professionnel et productif.

De même, l’Impératrice (III) est un symbole de fécondité, de créativité adolescente (qui peut partir dans tous les sens) ; la Mort (XIII) fait place à la création du nouveau.

 

4 – Stabilité

Le 4 se représente par un carré, forme géométrique la plus solide et stable (penser à une chaise dont les 4 pieds servent à donner une assise solide). C’est une plate-forme de sécurité qui va permettre de conquérir à partir de cette assise, mais si on y reste, on court au flétrissement.

  • Le Quatre de Bâtons est une reconnaissance : c’est la fête saisonnière, le mariage, tout ce qui atteste du fait que l’on peut compter sur la stabilité du désir.
  • Le Quatre de Coupes veut du repos après l’ivresse du 3 (mal de tête après les agapes). C’est l’indifférence, l’ennui, l’apathie ; le fait d’ignorer une opportunité.
  • Le Quatre d’Epées évite le débordement qui menaçait dans le 3 par une retraite, qui permet de s’organiser en définissant ce sur quoi nous nous appuierons désormais.
  • Le Quatre de Deniers veut la stabilité matérielle : conservateur, il protège les biens que le travail du 3 a fournis.

De même, l’Empereur (IV) est un symbole de structure, de loi, et d’inflexibilité ; la Tempérance (XIV) parle d’équilibre.

 

5 – Conflit

La belle stabilité du 4 est déséquilibrée par l’arrivée d’un élément extérieur ; il peut être difficile d’arriver à l’accommoder.

  • Le Cinq de Bâtons montre la rivalité qui naît de la mise en présence de différents désirs.
  • Le Cinq de Coupes porte le deuil des opportunités ratées par le 4 ; son conflit émotionnel limite son point de vue.
  • Le Cinq d’Epées montre la division et l’agressivité qui naissent des désaccords intellectuels.
  • Le Cinq de deniers fait éclater l’assise du 4 pour plonger dans les difficultés matérielles.

De même, Pape et Diable, qui sont l’envers l’un de l’autre, posent le problème de l’irruption de la parole supérieure (V) et de la pulsion inférieure (XV) dans notre conscience, qui est alors mise en crise.

 

6 – Victoire

C’est en le dépassant qu’on a pu surmonter le conflit ; on obtient donc quelque chose de supérieur.

  • Le Six de Bâtons voit un leader victorieux émerger de la rivalité du 5.
  • Le Six de Coupes console après le chagrin du 5 ; alors que ce dernier s’identifiait trop à ses problèmes, on revient à une innocence enfantine, mais en étant capable de l’apprécier.
  • Le Six d’Epées montre une prise de distance après les difficultés du 5 : on gagne en perspective lorsqu’on part pour d’autres rivages, on apprend à prendre du recul.
  • Le Six de Deniers est la solution apportée aux mendiants du 5. Avec la générosité, la solution vient de l’extérieur, ce qui rend possible la gratitude.

De même, l’Amoureux (VI) apprend que le véritable choix se fait en dépassant la raison, et la Tour/Maison-Dieu (XVI) nous arrache à nos croyances pour nous offrir le réel.

 

7 – Action

Avec le 7, on appuie le 3 créatif sur la stabilité du 4 : on est donc prêt à aller jusqu’au bout des choses.

  • Le Sept de Bâtons constate que la place acquise dans le 6 fait naître le défi de la part d’autrui ; avoir une position ne suffit pas, il faut être prêt la défendre, sinon c’est un travail incomplet.
  • Le Sept de Coupes donne libre cours à l’imagination. Celle-ci va jusqu’au bout de ses possibilités, quitte à nous fasciner et nous noyer dans le fantasme.
  • Le Sept d’Epées montre l’habileté intellectuelle en roue libre : elle utilise tous les moyens, dont le subterfuge, pour récupérer l’avantage après l’éloignement du 6.
  • Le Sept de Deniers constate qu’il ne suffit pas d’agir sur le matériel pour qu’il porte ses fruits : aller jusqu’au bout suppose de lui laisser le temps, car c’est un élément qui a sa propre temporalité.

De même, le Chariot (VII) décide, Etoile en tête, de partir à la conquête du Désir sans flancher en chemin ; l’Etoile (XVII) a ouvert les vannes en grand et se laisse entièrement traverser par ce désir.

 

8 – Expression libre

Le 8 se décompose en 4+4 : c’est une stabilité inférieure sur laquelle s’appuie une autre stabilité, supérieure. Les choses sont donc parfaitement en place : elles peuvent s’exprimer librement.

  • Le Huit de Bâtons montre le désir s’exprimer sans entrave : la passion nous emporte, et on risque de s’oublier.
  • Le Huit de Coupes abandonne les illusions du 7 ; s’être retrouvé permet une exploration profonde du monde intérieur.
  • Le Huit d’Epées est le résultat du 7, qui a utilisé ses capacités de construction pour atteindre ses buts : les constructions mentales s’expriment sans l’entrave de la réalité, donc en nous aveuglant.
  • Le Huit de Deniers est arrivé à la perfection de la technique, après que le 7 lui ait appris la patience.

De même, la Force (VIII pour Waite) a appris à faire s’exprimer ses énergies inférieures librement, sans avoir à les refouler ; et la Lune (XVIII) montre ce qu’il se passe lorsque nos parts inférieures s’expriment à l’unisson.

 

9 – Accomplissement

Le 9 est un chiffre parfait : 3+3+3, 3×3. L’élément est donc parfaitement accompli (mais il reste lui-même : c’est donc un accomplissement faible).

  • Le Neuf de Bâtons a été jusqu’au bout de son désir ; celui-ci ne l’a pas seulement oublié, il l’a aussi isolé comme une fortification.
  • Le Neuf de Coupes est arrivé à satiété à la suite des voyages du 8 ; mais trop se centrer sur le monde intérieur risque de faire oublier l’extérieur.
  • Le Neuf d’Epées voit le mental prendre toute la place, à un degré de plus que dans le 8. Les pensées s’enchaînent sans arrêt et deviennent angoissantes.
  • Le Neuf de Deniers est un accomplissement matériel : la richesse.

De même, l’Ermite (IX) peut se retirer parce qu’il a fait le tour des expériences dont il avait besoin (sa méditation l’entraînera à concevoir la Roue de Fortune), et le Soleil (XIX) rayonne d’avoir dépassé toutes ses contradictions internes.

 

10 – Transcendance

Avec le 9, on était arrivé à la fin de l’élément. Le 10 va plus loin, car c’est la fin d’un cycle : il est maintenant temps de passer à autre chose, donc d’aller au-delà (accomplissement fort).

  • Le Dix de Bâtons voit le désir dépasser l’individu en l’écrasant.
  • Le Dix de Coupes dépasse la satiété personnelle en montrant ce qu’est l’amour des siens.
  • Le Dix d’Epées cesse de se débattre pour accepter l’inévitable : c’est la mort de l’ego, un lâcher-prise qui permet une renaissance.
  • Le Dix de Deniers dépasse la richesse personnelle en introduisant la notion de transmission.

De même, la Roue de Fortune (X) indique la façon dont on peut dépasser le mouvement du monde, et le Jugement (XX) ramène le désir individuel à la Volonté divine dont il est issu.

Parmi les chiffres, chaque élément est manquant s’il est pris seul, hors de l’harmonie qu’il doit former avec les autres ; c’est la raison pour laquelle les “accomplissements” ne sont pas forcément joyeux ou positifs. La progression de 1 à 10 montre les différentes étapes par lesquelles un élément se développe : apprendre la façon dont il réagit nous fait avancer dans la connaissance du monde.